FOMO : L'angoisse de manquer sa vie, même lors des plus petites choses
13/07/2025
Tu es chez toi, il est 21h06, tu as préparé des pâtes au pesto et lancé un vieux film d'auteur mal sous-titré… Et voilà !
Tu lances Instagram.
Tu observes une terrasse à Paris, une copine à Bali en posture du chien tête en bas, un ancien qui rit avec une femme mystérieuse (qui est manifestement moins tendance que toi), et une autre en train de dîner chez une créatrice végane, « trop inattendu ». Et c'est là que la spirale commence : « Pourquoi ne suis-je pas là-bas ? »
« Et si je passais à côté de quelque chose d'énorme ? »
"Est-ce que ma vie est pitoyable ou est-ce simplement mon réfrigérateur qui l'est ?"
Bienvenue dans l'époque du FOMO : Fear Of Missing Out, ou cette peur constante de rater quelque chose — tout — tout le temps.
Le FOMO : une anxiété de classe camouflée en enthousiasme social
Soyons explicites. Le FOMO ne se limite pas simplement à une tendance générationnelle TikTok.
C'est l'indice d'un monde souffrant de sa propre rapidité, une fièvre du « toujours plus et mieux ailleurs », nourrie par le capitalisme et le Wi-Fi. C'est ce qui se produit lorsque ta valeur individuelle est mélangée avec ton niveau de productivité.
Inactif égale invisible égale indésirable égale non vivant. Tu ne partages pas de story la nuit ? Tu n'es plus là.
Tu ne sors pas le vendredi ? Tu n'as pas de commentaire à faire lundi matin.
Tu es en train de ralentir ? Tu es en train de t'éteindre socialement. Le FOMO est une peur du vide camouflée sous le masque de l'hyperactivité.
Une société du direct
Dans le domaine des réseaux, la rapidité de l'information est primordiale.
On ne vit plus : on « saisit » des instants, on « diffuse » du présent, on « transmet » des émotions.
Et dans cette avalanche de contenus, le non-participant se transforme en absent. Ce n'est plus « je pense donc je suis », mais plutôt « je démontre, donc j'ai de la valeur ».
Le capitalisme du divertissement
On nous ordonne de jouir.
Tout le temps.
Et si cela est faisable, en consommant. Le FOMO représente l'instrument du capitalisme du plaisir : une force implacable qui te pousse à agir, exposer, se déplacer, acheter, publier. Sinon, qu'est-ce que tu es ? Un mollusque déprimé en tenue de jogging qui lit Krishnamurti en silence ? (Par conséquent : une menace pour l'économie.)
L'épuisement dû à l'hyperdisponibilité
Slack, WhatsApp, Instagram, TikTok, Twitter, LinkedIn…
On dirait que nos identités sociales se sont transformées en chaînes de télévision continues, qu'on fait défiler, qu'on critique, qu'on espionne.
Mais qui est capable de créer du contenu tous les jours sans se consumer de l'intérieur ?
Néanmoins, on fait quand même un effort. Car la société nous a persuadés que le fait de ralentir équivalait à trahir.
Et si on optait pour la JOMO ? (Joy of Missing Out)
On désigne ces individus qui choisissent délibérément de couper leur téléphone, de rester chez eux à observer leurs plantes pousser, et de manquer intentionnellement certaines choses : les gens heureux. La JOMO (Joy Of Missing Out) est la solution alternative.
C'est accepter de ne pas être présent partout et à tout moment pour enfin être pleinement présent quelque part. On dit NON à :
Trois afterworks décevants avec des petits fours tièdes.
12 demandes d'amis de faux amis qui ne connaissent pas ton nom de famille.
1 soirée costumée qui respire le stress social.
Et dire OUI à :Ton lit est propre à 22h.Une promenade sans portable. Un film médiocre sans remords. Respirer sans un but précis.
Le syndrome de la vitrine
Tu ne rateras jamais l'essentiel si tu te reconnectes à toi.
Le vrai "manque" dans le FOMO, ce n'est pas l'événement que tu loupes, c'est ta propre présence.
Et si tu continues à dire oui à tout, tu finiras par dire non à toi-même.
Le vide est une chance. Il contient ce que tu peux devenir.
Et puis soyons honnêtes :
90 % des trucs que tu rates sont nuls, creux, bourrés de musique trop forte et de verres sans fond.
Tu ne rates pas ta vie.
Tu la sauves.
Par : Anne-Sophie MESLEM